lundi 29 juillet 2013

Donner son avis, ça sert à quoi au juste ?

Dans la vie, c'est bien connu, il y a trois endroits où nous devenons des putains de philosophes qui seraient capables de changer la face du monde : sur le trône, sous la douche et au lit. En ce qui me concerne, je ne trouvais pas le sommeil hier soir, donc à force de me tourner et me retourner dans mon plumard, j'ai fini par me poser des questions hautement existentielles. Et je me suis dis "Pourquoi, quand je finis un jeu, je me sens obligé de donner mon avis en public ? Pourquoi je m'insurge quand quelqu'un n'est pas de cet avis ? Pourquoi ça m'énerve quand quelqu'un crache tout son fiel sur FFXIII alors que je l'ai adoré ? Pourquoi je comprends pas l'engouement sur Assassin's Creed alors que je trouve le premier opus absolument à chier ?"
J'avoue, j'ai vraiment une vie difficile pour avoir ce genre de réflexion à 2 heures du matin. Mais suite à une courte conversation que j'ai eu avec un ami à propos de The Last of Us, j'ai vraiment cogité, et je me suis dis que je pourrais poster ça sur mon blog mourant, histoire de. Parce que j'aime mettre mes pensées à plat.


  • Pourquoi j'écris ?

Bon, effectivement, sur ce blog, je n'écris plus depuis plusieurs mois. Cependant, dès que je finis un jeu, j'y vais de mon petit commentaire sur Facebook, histoire d'avoir l'un ou l'autre retour parmi mes contacts gamers. Dans les deux cas, pourquoi je fais ça ? Je pense que, tout simplement, quand un jeu m'a transporté, j'aimerais partager ce sentiment. J'aimerais que d'autres joueurs fassent l'expérience, et me disent ensuite "Putain oui, t'avais trop raison."
Très franchement, ça part d'une bonne intention. Mais bordel que c'est profondément stupide. Quand je balance mon avis sur un jeu, je ne fais pas un test qui se veut objectif (même si j'ai un peu essayé sur ce blog au départ, sans succès), je donne MON avis, MON ressenti sur l'expérience que j'ai vécu. Et de quoi ça dépend tout ça ? De mes goûts, de mes attentes, et de mon vécu. C'est avec ces trois ingrédients ajoutés au jeu que naît mon avis final sur celui-ci. Est-ce que tout le monde a les mêmes goûts ? Non. Les mêmes attentes ? Sûrement pas, c'est pour ça qu'il y a une flopée de genres de jeu différents. Le même vécu ? Jamais de la vie, y'a autant de vécus différents que de gens sur cette planète. En gros, pas un seul avis sur un jeu ne sera le même à 100%, parce que tout va dépendre de micro-facteurs propres à chacun.

En y pensant, même un test de jeu en soi, c'est du bullshit. Alors certes, le testeur, avec plus ou moins de professionnalisme, va tenter de relever les points vraiment bons ou vraiment merdiques qui mettront tout le monde d'accord, mais après cela, son avis tout personnel entrera en compte. Pour moi, un bon exemple vaut mieux que des explications interminables qui ne vont nulle part. Je vais donc parler d'un jeu : Hyperdimension Neptunia Victory, sorti il y a quelques mois sur PS3. Un cobaye au hasard, je prends le test de jv.com. Allons-y sans détour, le testeur déglingue le jeu. Il lui colle un bon vieux 10/20, et insiste sur le fait que le jeu soit niais, plein d'humour japonisant stupide, que l'histoire est ridicule et la difficulté inégale. Et j'en passe. Et il ne se mouille pas, disant à la fin de son test que la note peut fluctuer selon le public. Bravo, mais ça tu peux le dire pour n'importe quel jeu mon bon ami.
D'un autre côté, la note moyenne des lecteurs est de 17/20, et j'ai moi-même adoré ce jeu, n'ayant pas honte d'avouer qu'il s'agit d'un de mes jeux préférés sur cette génération de consoles. Pourquoi ? Les trois ingrédients :
- Mes goûts : je suis un grand fan de japanime. J'adore l'humour idiot, les univers décalés remplis de nénettes délurées au design improbable. J'aime beaucoup les visual novel, où la mise en scène doit se faire dans notre imagination, aidée par les artworks et quelques décors en images fixes. Sur ce point, Neptunia tape dans le mille pour moi.
- Mes attentes : je n'attendais RIEN du jeu, ne connaissant pas du tout la série. De ce fait, je n'ai pas eu de déception, et tous les aspects du jeu m'ont agréablement surpris.
- Mon vécu : je baigne depuis très longtemps dans la japanime, et je m'abreuve d'anime fan service bourrés de nénettes en petite culotte. Je suis accoutumé à ce genre d'univers, donc Neptunia m'a paru bien familier tout de suite. C'est évident que si je ne jouais qu'à des jeux de guerre, j'aurais été décontenancé.
Bref, mon avis personnel concernant tout cela est qu'il s'agit d'un excellent jeu. Mais c'est MON avis. Dans ce cas, comment peut-on qualifier ce qu'a écrit le rédacteur de jv.com de test ? N'est-il pas censé être le plus neutre possible par rapport au jeu, afin de donner envie au public cible de se le procurer, et aux autres de passer leur chemin ? Ce que j'ai lu là, c'était un avis, tout aussi subjectif et donc inutile que le mien. La différence, c'est que l'article de ce rédacteur sera lu, et aura un impact sur les joueurs et la possibilité d'achat du titre.


  • Jouer à un jeu, hier et aujourd'hui.

Alors certes, les tests peuvent être dans l'ensemble des indicateurs utiles, si on arrive à faire le tri dans ce qu'on lit, et ainsi éviter d'acheter des jeux trop moisis. Ou devrais-je plutôt dire qui ne nous conviendront pas. On dira ce qu'on veut, aujourd'hui, en grande majorité, notre propension à acheter un jeu dépendra des notes et critiques des testeurs. Ou dans une moindre mesure, on aura été chauffés par les 50 trailers et 1200 images de l'éditeur qui nous auront montré plus de la moitié du jeu.

Je dois avouer que je suis nostalgique du joueur que j'étais enfant, sans internet, naïf et émerveillé par n'importe quoi. Tous mes jeux Nes, Gameboy, Megadrive (N64 déjà un peu moins), je les achetais au hasard, à la jaquette très souvent. Mais je ne me posais pas la question "Est-ce qu'il va être bien ? J'espère que le gameplay n'est pas trop pourri. Si je le finis trop vite parce qu'il a une durée de vie moisie, je vais rager." Non, j'achetais, je jouais, et inévitablement, j'étais content. Parce que les défauts, je m'en contrefoutais. J'avais une tolérance que j'ai perdue en grandissant. Est-ce parce que j'ai joué à de plus en plus de jeux vidéo que mes exigences sont devenues plus strictes ? Est-ce que je subis l'influence des avis lus ça et là ? Ou alors je suis juste devenu un vieux con aigri ? Je n'en sais rien, c'est peut-être un peu de tout ça, mais je regrette un peu de me voir cracher sur des jeux que j'aurais trouvé fantastiques quelques années en arrière.

Je pense qu'au-delà du fait de grandir, le contexte dans lequel on joue (le vécu dont je parlais la partie précédente donc) fait beaucoup quant à l'avis qu'on se fait sur le jeu. Des fois, j'entends parler de contexte de sortie d'un jeu. Bon alors ça je le dis tout de suite, je trouve ça d'une connerie sans précédent. Personnellement, je m'en bats les couilles de savoir que quand il est sorti en 1992, The Revenge of the Mutant Banana 5 était une révolution. Si je le fais en 2013, je pourrai me tourner comme je veux, j'arriverai pas à me mettre dans un état d'esprit d'il y a 20 ans, tout simplement parce qu'en 20 ans, j'ai vécu des trucs, mes attentes ont évolué, donc bon, mon avis sur le jeu sera un avis 2013, point. 

De nouveau, un exemple vaut mieux que tout, et je vais exprès prendre un titre qui fait toujours couler de l'encre : Final Fantasy VI. Pour ma part, j'ai commencé la saga FF avec le septième opus. J'ai ensuite fait le 8, le 9 puis le 10. C'est donc seulement après ça que j'ai découvert le sixième opus qui est souvent considéré, à tort ou à raison j'en sais rien et je m'en tape, comme l'un des meilleurs, si ce n'est le meilleur de la série. Bon bah voila, moi j'ai joué à FFVI, et j'ai trouvé ça bien, sans plus. Et ouais, t'as vu. Mais c'est MON putain d'avis, qui dépend de mes trois putains d'ingrédients, et là-dedans, le vécu fait la plus grosse part. Comment voulez-vous, après avoir joué aux quatre opus suivants, que j'aie le même ressenti que les gens qui l'ont fait à l'époque ? Pour moi, FFVI était archaïque au moment où je l'ai fait. Il manquait les cinématiques, les persos assez bien modélisés pour qu'il y ait un peu de mise en scène, j'ai trouvé le système de magies et d'invocations simpliste, l'aventure courte (moins de 25 heures pour le finir). Bref, je me suis pas ennuyé, mais c'est pas un FF inoubliable pour moi. Pourquoi ? Parce que avant ça moi j'ai vu des matérias et un sphérier, des cinématiques qui m'ont arraché la rétine, des séquences émotions tellement bien mises en scène que j'en ai chialé. Je ne peux pas, je ne peux clairement pas pleurer devant un sprite 16 bits qui pleure ses camarades sprites morts. Pas parce que le jeu est mauvais, mais parce que je l'ai fait dans un contexte et avec un vécu tout à fait différents que lors de la sortie du jeu.
Et de la même manière, là où FFVII est mon préféré pour de multiples raisons, je sais pertinemment que d'autres joueurs vont le trouver au mieux moyen, au pire complètement naze. Est-ce que je peux leur en vouloir, moi qui reste de marbre devant le sixième opus ? Non. Alors il faut arrêter de parler de replacement dans le contexte, à moins de procéder à un effacement de mémoire, ça marche pas bien.

Apprécier un jeu dépend de tellement de critères qu'en y réfléchissant, je me demande bien qu'elle est l'intérêt d'en débattre pendant des heures, et de se référer à une multitude d'avis avant de se procurer un titre. Surtout que maintenant que je suis adulte, l'argent investi dans un seul jeu ne représente plus une somme astronomique, donc si je me plante, ce n'est pas bien grave, surtout quand il est possible de trouver des bonnes affaires.


  • L'avis des joueurs et leur influence

Quand on aime le jeu vidéo, on aime en parler. C'était le sujet de conversation des cours de récré, et ça reste maintenant les sujets de conversation sur Facebook ou sur les forums et sites dédiés. La différence regrettable, c'est que quand on en discute de vive voix avec ses potes, voire des inconnus au détour d'une convention, la conversation sera courtoise. Quand les avis divergeront, chacun exposera son point de vue. Et si ma foi il n'y a pas de terrain d'entente, on passera à autre chose. Tandis qu'aujourd'hui, il y a surtout internet. Et sur internet, quand on essaie de discuter, ça dérape toujours. Entre les trolls et les rageux, il est difficile d'appuyer efficacement son avis, surtout quand en face, on a des gens bien planqués derrière leur écran qui ne vont pas hésiter à sortir les pires atrocités du monde qu'ils n'auraient jamais oser dire en face à face. Parce qu'il ne peut justement rien leur arriver. De ce fait, les débats n'en seront jamais, vu que chacun campera ses positions et ignorera les arguments de l'opposant, en ponctuant bien souvent d'un "lol ta dé gout de merde conar".

Moi-même, bien que je ne participe quasiment pas à ce genre de conversations inutiles, je fulmine vite quand ça déblatère sur un jeu que j'apprécie particulièrement et qu'il se fait fumer. Pourtant, ne devrais-je pas m'en foutre, moi qui dit plus haut qu'il y a autant d'avis différents que de joueurs ? En y réfléchissant, je pense que plus que la divergence d'avis que je peux accepter, c'est la façon de parler qui m'insupporte. Et plus encore, l'impact que ça peut avoir. Car avec l'internet 2.0, les grandes gueules ont hélas souvent réussi à se faire entendre. Deux exemples me viennent directement à l'esprit. Le premier, c'est Final Fantasy XIII, tournant majeur dans la saga, car totalement différent de tout ce qu'on a pu voir jusqu'à présent. FFXIII a reçu dans l'ensemble un bon accueil et de bonnes critiques de la part des testeurs. Cependant, quand on regarde la communauté de joueurs, le jeu se fait démonter, insulter, rouler dans la boue. Et c'est un avis qui gonfle toujours plus, tellement la minorité bruyante est évidemment bien plus visible que la majorité silencieuse qui joue dans son coin. Ce qui m'énerve donc, c'est l'impact que peut avoir cette minorité bruyante. Mon deuxième exemple illustre parfaitement le genre de conséquences qui peuvent découler de ces râleries qui sont honteusement écoutées et prises en compte : Mass Effect 3. La fin de la saga a été conspuée par les joueurs qui ouvrent leurs gueules. Résultats des courses : les développeurs ont rajoutés de longues scènes, et les ont proposé en téléchargement gratuit, les nommant "Fins enrichies". La question n'est pas de savoir si la fin de base de ME3 était bonne ou mauvaise, chacun se fera sa propre opinion. Non, ce qu'il faut voir là, c'est qu'une poignée de trous du cul ont fait une telle pression qu'ils ont conduit les devs à revoir la copie de leur titre. C'est comme si on allait dire à un réalisateur que la fin de son film est moisie, et qu'il allait retourner des scènes pour contenter les gens déçus. Sérieux, c'est quoi cette MERDE ? Tu joues à ton jeu, s'il te plait c'est cool, s'il te plait pas, bah tu fermes bien ta gueule et puis c'est tout. Non mais vous imaginez ça 10 ans en arrière ? Personne n'aurait pensé une seule micro seconde à faire ce genre de remontrance. Et maintenant, ça devient une mode. Parfois même, ça crache sur un titre avant sa sortie. Résultat des courses : Bioware demande maintenant à sa communauté ce qu'ils veulent pour Mass Effect 4.


Depuis quelques temps, internet a transformé malgré moi ma façon d'accepter l'avis d'autrui. La peur de l'influence mêlée à la frustration de ne pas pouvoir avoir de conversation posée font qu'aujourd'hui, quand quelqu'un a un avis différent du mien, ça me gonfle. Et je suis le premier à trouver ça regrettable. Parce que ça me manque de discuter d'un jeu calmement avec mes amis, et que même si nos avis sont différents, on arrive à chacun exposer notre point de vue et accepter celui de l'autre.
C'est difficilement possible actuellement, et c'est pourquoi j'hésite de plus en plus à donner ne serait-ce que mon petit avis sur Facebook quand je termine un jeu. Après tout, je joue pour moi, pas pour les autres. Et tenant compte des goûts de chacun, comment puis-je espérer partager un ressenti en martelant mon avis comme un boeuf ? Les seuls pouvant en profiter seraient mes amis proches qui, connaissant mes goûts depuis des années, pourraient interpréter mon avis au mieux afin de savoir si le jeu leur conviendrait aussi. Et encore.


  • Vers une remise en question ?

Vous l'aurez peut-être compris, mais j'ai surtout écrit cet article pour moi. Il n'est pas vraiment construit, et j'ai un peu balancé mes idées en vrac. Mais au fil de l'écriture, lorsque je posais mon ressenti, je réfléchissais à ma façon d'être.
Je me suis souvent moqué en lisant des forums où des gens établissaient leur top 5/10 de leurs jeux préférés. Même si beaucoup expliquaient les raisons de leurs choix, je me disais "P'tain, faut avoir de sacrés goûts de merde pour mettre ce jeu là dans un top.". Or, qui suis-je pour juger des goûts des autres ? En quoi mes propres préférences seraient plus crédibles que celles des autres ? Le but d'un jeu étant de procurer un plaisir de divertissement, qu'est-ce que cela peut me faire que quelqu'un ait pris son pied sur un jeu que j'ai détesté ? Moi qui devrait être content, en tant que joueur, que des personnes partagent leur ressenti sur l'un ou l'autre jeu en prenant même le temps d'expliquer le pourquoi du comment, à la place je me suis foutu de leur gueule.
J'ai conspué Tales of Graces f parce qu'il n'était pas à la hauteur de mes espérances. Est-ce que cela en fait un mauvais jeu ? Est-ce intelligent de tellement le critiquer alors qu'une de mes amies aimerait bien le tester, et qu'elle pourrait l'apprécier ? Est-ce bien la peine de m'insurger lorsque je dis que The Last of Us est pour moi le meilleur jeu de cette gen, et qu'on me dit le contraire ? A quoi bon gueuler sur les toits que je n'aime pas du tout Assassin's Creed ? 
Je pense qu'il est tout aussi idiot de défoncer un jeu pour dissuader les gens d'y jouer que d'en encenser un alors que certains ne le trouveront pas si exceptionnel que ça. Je joue aux jeux vidéo pour vivre des aventures et ressentir diverses émotions, pas seulement pour me divertir. Et quoi de mieux que de partir à l'aventure en terre inconnue ? Être emballé ou déçu ne tient qu'à moi, et c'est à travers les expériences que je vivrai que je saurai ensuite vers quoi me tourner. Et sûrement pas en lisant un avis ou un test lambda.

Je veux redevenir un joueur qui joue pour le plaisir de la découverte, et non pas pour le désir de faire les jeux overhypés. Un joueur qui accepte les différences d'opinion et les goûts des autres. Un joueur qui se fiche d'avoir tel ou tel bagage pour constater qu'un jeu n'est pas si exceptionnel qu'il n'y parait parce qu'il baigne dans les clichés pour peu qu'on connaisse les bonnes références. Bref, un joueur qui se défait de son comportement de vieux con blasé élitiste.